Le général-major Yahya Rahim Safavi, conseiller militaire personnel de l'ayatollah Ali Khamenei, guide suprême de la république islamique d’Iran, a annoncé, il y a quelques jours, que 22 pays à travers le monde ont adressé à Téhéran des demandes officielles en vue d’acquérir des drones militaires de fabrication iranienne. Le «succès» des drones iraniens, qu'utilise l’armée russe dans le conflit en Ukraine a fortement contribué à augmenter les rangs de leurs clients.
Selon ce haut responsable militaire, dont la déclaration a été reprise par l’agence de presse officielle iranienne (IRNA) et relayée par plusieurs journaux et sites locaux, les principaux alliés de l’Iran, en dehors de l’Asie, à savoir l’Algérie, en Afrique du nord, et le Venezuela, en Amérique du sud, figurent en tête des gros clients ayant commandé des drones militaires iraniens.
Ce n’est certes pas la première fois que l’Algérie se dote de ce type d’armement, puisque son armée dispose déjà, depuis au moins une décennie, de nombreux drones sud-africains, chinois, émiratis ou turcs. Mais jusqu’ici, Alger n’a jamais communiqué ni sur ses fournisseurs en drones militaires, ni sur leur nombre ou la nature de leur mission (espionnage, tirs ou guidage de missiles…). Ce qui est nouveau, donc, c’est que Téhéran divulgue la liste des clients de ses drones militaires, parmi lesquels on retrouve bien évidemment ses principaux alliés idéologiques, dont l’Algérie.
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Qui se rassemble s’assemble, dit-on. En effet, il n’est pas étonnant de retrouver l’Algérie dans cette liste des utilisateurs et prétendants aux drones militaires iraniens, aux côtés d’Etats faillis, comme le Venezuela, ou en guerre permanente, comme l’Arménie, aux prises avec l’Azerbaïdjan au Nagorny-Karabakh, et surtout de mouvements subversifs comme les milices chiites libanaises du Hezbollah, ou celles alimentant la guerre civile dans leur pays, comme les chiites yéménites des Houthis, sans parler des factions ennemies qui s’entretuent en Irak, en Syrie... Tous ces Etats et autres milices ont en commun d’être armés de drones militaires iraniens, qui leur sont parfois gracieusement fournis, avec lesquels ils s’attaquent souvent à des pays voisins, comme c’est par exemple le cas des agressions sporadiques menées par les Houthis en Arabie Saoudite.
Il n’est donc pas étonnant dans ces conditions que, début octobre dernier, le soi-disant ministre de l’Intérieur du Polisario, Omar Mansour, ait annoncé que les milices séparatistes établies dans les camps de Tindouf seront incessamment dotées de drones par l’armée algérienne, en vue de mener des attaques militaires contre le Maroc.
Les deux annonces sur les drones militaires commandés par l’Algérie, faites à quelques jours d’intervalle par un dirigeant du Polisario puis par un haut dignitaire militaire iranien, se recoupent. Elles viennent clairement confirmer que les drones iraniens qui intéressent l’Algérie seront aussi destinés au Polisario.
Le bellicisme perse dans la région du Maghreb est devenu d’autant plus manifeste, que l’Algérie et l’Iran soutiennent ardemment un retour à une bipolarité du monde. C’est la raison pour laquelle ces deux pays n’ont jamais caché leur soutien à la Russie dans sa guerre contre l’Ukraine, où l’Iran vient de reconnaître officiellement, après l’avoir longtemps nié, qu’il a bien fourni les drones militaires avec lesquels la Russie opère actuellement en Ukraine. D’ailleurs, des sanctions occidentales ont déjà été prises contre toutes les sociétés liées de près ou de loin à la commercialisation des drones iraniens.
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Si l’on y ajoute que le dernier sommet de la Ligue arabe, tenu à Alger même il y a deux semaines, a clairement mis en garde le régime des mollahs contre la déstabilisation des Etats arabes, il devient légitime de se demander si l’Algérie cherche délibérément à s’isoler en établissant une alliance contre-nature avec un pouvoir chiite, dont la légitimité repose sur ses tentatives à faire s’effondrer le monde sunnite.
En tout état de cause, avec ces nouvelles révélations du général-major Yahya Rahim Safavi, il ne sera plus possible à l’appareil militaro-politique en Algérie de pousser des cris d'orfraie quand on dénonce ses accointances avec le régime des mollahs.